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La création comme processus de transformation (FITRAM)

Diagnostic différentiel de l’art-thérapie et tentatives de définitions (FITRAM)

FITRAM : Fédération Internationale de Thérapie et de Relation d'Aide par la Médiation

Avant même de proposer une définition de l’art-thérapie, je vais essayer de dire synthétiquement ce qu’elle n’est pas, selon moi :

  • L’art-thérapie comme toute psychothérapie n’a pas d’objectif précis, que celui-ci soit la réduction du symptôme, la socialisation ou une visée professionnelle. Elle n’est ni rééducation, ni thérapie occupationnelle, ni ergothérapie, ni sociothérapie. Elle a par contre un projet : le mieux-être, l’amélioration voire la guérison de la personne. Ne s’attaquant pas directement à ce qui est à résoudre mais s’adressant à la personne dans sa globalité, elle n’en est que plus efficace que d’autres « thérapies » qui ne s’adressent qu’au symptôme à supprimer sans s’apercevoir que sa disparition risque d’en susciter d’autres en substitution.
  • L’art-thérapie n’est pas un test projectif. Elle ne sert pas à parfaire un diagnostic. Elle ne sert pas non plus à dévoiler les problématiques de la personne, par exemple « Ton tableau révèle ta hantise de la mort ! », elle est déjà leur dépassement dans leur mise en scène, leur figuration complexe dans une production artistique. Elle ne révèle pas ce qui est, elle ne montre pas ce qui était déjà là, elle amorce un mouvement vers ce qui peut être, ce qui peut se représenter dans le symbolique et se mettre en processus d’une création à l’autre. Pour éclairer cette distinction, je prendrai l’exemple d’un dessin qui représente la violence d’un monstre sur le héros. Cela peut être perçu par le thérapeute comme signifiant la violence d’un père réel sur son fils, le dessin a servi de test pour mieux connaître le patient. Mais l’art-thérapeute préfère le prendre comme une symbolisation thérapeutique de cette même violence par le patient lui-même, ce qui le soulage et permet de la dépasser car il est alors « Sujet », auteur d’une production qu’il nourrit de ses peurs, ce qui l’aide à les conjurer. Cette perspective est dynamique et va dans le sens des ressources de la personne pour surmonter elle-même ses difficultés si elle est bien accompagnée de façon discrète et respectueuse, alors que la première attitude à visée cognitive, plus statique, est fréquente dans un Occident qui cherche toujours à tout expliquer plutôt qu’à offrir sa vacuité à l’inconnu, comme le préconise l’art-thérapie qui respecte l’indicible et se déploie dans la pénombre.
  • L’art-thérapie ne se limite pas à une expression en vue de décharge et de soulagement. Elle n’est ni thérapie émotionnelle ni recherche de catharsis ni expulsion du mal qui confine à l’exorcisme. Il s’agit en art-thérapie, pour la personne, moins de découvrir les significations de son œuvre que de poursuivre le travail de création dans une évolution imprévisible. A la limite, on peut dire que sa dynamique peut n’avoir pas de fin.
  • L’art-thérapie ne concerne pas que la personne, c’est un combat ou plutôt une négociation avec la matière : peinture, pâte à modeler, terre, collage, sculpture, si elle ne s’adresse qu’aux arts plastiques comme á son origine et dans le présent livre. Mais elle peut aussi faire appel à marionnette, invention orale ou écrite, voix, musique, gestualité, corps en mouvement, danse, théâtre, conte, clown, etc. Dans tous les cas, la personne n’œuvre pas principalement dans l’introspection. L’art-thérapie est une façon de parler de soi sans dire « je ». La matière est un interlocuteur qui a son caractère, qui se défend, qui a ses exigences. L’art-thérapeute sert de médiateur entre le(s) patient(s) et la matière.
  • L’art-thérapie est un projet qui tente de relever le défi de la transformation, au moins partielle, de la maladie physique ou mentale, du malaise, de la marginalité douloureuse, du handicap, en enrichissement personnel. La douleur, le mal, le trauma deviennent des épreuves que la personne doit surmonter, dépasser pour en faire une étape de son cheminement.
  • L’art-thérapie comme toute vraie thérapie est un accompagnement du travail d’un Sujet sur lui-même, d’une « autothérapie », avec la particularité qu’il le fait non en direct mais à travers ses productions soutenues par l’art-thérapeute. Celui-ci permet que ces productions issues de la personne tracent un parcours symbolique vers un “être davantage” qui comprend forcément un “aller mieux”.

L’art-thérapie se situe entre deux bornes qui sont autant de tentations dans lesquelles elle ne devrait pas tomber … :

  • La première borne est la psychothérapie avec support artistique : il ne s’agit pas d’art-thérapie mais de la démarche traditionnelle de psychothérapie psychanalytique, à la différence que le discours qui y est tenu n’analyse pas immédiatement les rêves, les lapsus, les souvenirs mais passent par des figurations plastiques (autoportrait par exemple), littéraires (récits de vie), corporelles (représenter sa peur), sonores (moduler sa plainte), … Cette tentation du modèle psychanalytique est majeure lorsqu’il s’agit d’une accompagnement individuel.
  • La deuxième borne est l’atelier artistique sans qu’il y ait véritablement projet thérapeutique. L’hypothèse est que la découverte de la peinture, du modelage ou du collage suffit en soi sans qu’on favorise une certaine projection de soi et de ses problématiques dans la matière proposée. Cela se produit principalement lors du travail de groupe. Le risque est alors de tomber dans l’activité de loisir. Le piège est alors souvent la tentation du joli stéréotypé, du bon moment passé ensemble, ou de la réalisation trop conforme à une esthétique attendue, toutes choses qui peuvent détourner du profond.

Ce qui m’amène à cette proposition de définition * :

L’art-thérapie est un accompagnement de personnes en difficulté (psychologique, physique, sociale ou existentielle) à travers leurs productions artistiques : œuvres plastiques, sonores, théâtrales, littéraires, corporelles et dansées. Ce travail subtil qui prend nos vulnérabilités comme matériau, recherche moins à dévoiler les significations inconscientes des productions qu’à permettre au sujet de se re-créer lui-même, se créer de nouveau, dans un parcours symbolique de création en création. L’art-thérapie est ainsi l’art de se projeter dans une œuvre comme message énigmatique en mouvement et de travailler sur cette œuvre pour travailler sur soi-même.

Les interventions d’artistes, de soignants, travailleurs sociaux et enseignants formés à l’art-thérapie, s’étendent désormais au champ social et pédagogique et permettent notamment de traiter le problème de la violence contemporaine. L’art-thérapeute travaille en milieu institutionnel ou en développement personnel, en libéral ou associatif, en individuel ou en groupe. Cette pratique commence à s’étendre au monde de l’entreprise.

L’art-thérapie est une symbolisation accompagnée.

On peut simplifier ces définitions par celle que j’ai proposée au dictionnaire Robert :

Accompagnement thérapeutique de personnes, généralement en difficulté, à travers la production d’œuvres artistiques.

 

 

Lien internet : http://www.fitram.eu/Articles/Therapie-art/rt



30/04/2013
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